La sérialisation des médicaments pour lutter contre la falsification

Pour lutter contre la falsification, les boîtes de médicaments vont être sérialisées
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En 2011, une directive européenne pour lutter contre la falsification des médicaments a été adoptée. Elle prévoit de rendre obligatoire la sérialisation des boîtes de médicaments humains soumis à prescription médicale obligatoire distribués en Europe à partir de février 2019. Qu’est-ce qu’est la sérialisation ? Comment fonctionne-t-elle et comment doit-elle permettre de lutter contre la falsification ? Quels sont les enjeux pour les industriels ? Vous trouverez la réponse à toutes ces questions dans la suite de cet article.

La sérialisation, qu’est-ce que c’est ?

La sérialisation est le fait d’apposer un numéro de série unique sur chaque boîte de médicament afin de pouvoir l’identifier individuellement. Ce numéro peut être vérifié tout au long de la chaîne de distribution et en particulier par le pharmacien d’officine ou hospitalier avant de délivrer le médicament au patient pour s’assurer de son authenticité. En effet, le numéro unique comporte des informations sur le produit (nom, forme pharmaceutique, dosage…), le remboursement (si requis dans le pays), le numéro de lot et la date de péremption en plus du numéro de série (suite de chiffres ou lettres générée aléatoirement).

C’est une règlementation qui a été adoptée dans la directive européenne n°2011/62/UE et le règlement délégué n°2016/161 et qui sera applicable au 9 février 2019 dans la majorité des pays d’Europe (certains pays ont une dérogation pour que ça ne soit applicable qu’à partir de 2025).

Voici quelques informations sur ce numéro unique :

  • Il est unique au niveau mondial. La règlementation impose qu’un même numéro ne puisse pas être réutilisé avant la date de péremption du médicament + 1 an, ou la date à partir de laquelle le médicament peut être vendu + 5 ans (la date la plus longue étant privilégiée).
  • Il est généré de façon aléatoire, même au sein d’une production continue. Ceci permet de limiter le risque qu’il soit deviné par un falsificateur et qu’il soit donc à son tour falsifié.
  • Il est encodé dans un code-barres bidimensionnel, aussi appelé « datamatrix ». C’est un format normalisé au sein de l’Union européenne afin qu’il soit reconnu et décodé dans tous les États membres avec les appareils courants.

Le numéro de sérialisation sera encodé dans un datamatrix

Afin d’être certain que le contenu de la boîte n’a pas pu être modifié après l’emballage et qu’il correspond donc bien aux informations liées au numéro unique, la règlementation européenne a rendu obligatoire en même temps la mise en place d’un système antieffraction. Celui-ci, qui peut se présenter sous la forme d’un petit autocollant qu’il faut décoller ou casser pour accéder à l’intérieur de la boîte, garanti que la boîte n’a pas été ouverte ou qu’elle n’a pas subi d’altération depuis sa sortie de l’usine de fabrication.

Actuellement, l’apposition d’un numéro unique est uniquement obligatoire au niveau de la boîte. Cependant, il pourrait s’étendre aux boîtes dites « agrégées », c’est-à-dire regroupées. Un numéro unique pourrait ainsi être apposé sur les boîtes assemblées pour être vendues par lot, permettant de remonter individuellement aux boîtes qui le composent. De la même façon, un numéro unique pourrait être apposé sur un carton contenant des boîtes ou bien sur une palette contenant des cartons de boîtes, et il permettrait à nouveau de remonter au détail des boîtes présentes dans le carton et sur la palette. En effet, plus ce système est complet et complexe, plus il est difficile à imiter et donc mieux il protège de la falsification. Cependant, il devient aussi très difficile à mettre en place par les industriels eux-mêmes.

Pourquoi mettre en place la sérialisation ?

Pour lutter contre la falsification, les boîtes de médicaments vont être sérialisées

La décision de mettre en place des moyens de lutte contre la falsification de médicaments se base sur un constat simple : il y a de plus en plus de médicaments falsifiés qui circulent dans l’Union européenne et dans le monde en général, à la fois à travers des moyens illégaux, mais aussi dans le circuit de distribution légal. Aujourd’hui, on considère que 15 % des médicaments vendus dans le monde sont des falsifications. Ces produits présentent un risque pour le patient qui les utiliserait, car les composants sont souvent de qualité moindre, mal dosés ou même totalement absents.

Des moyens de contrôle sont déjà en place pour veiller à la sécurité du médicament. Ainsi, il y a une agence du médicament par pays (exemple : l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ou ANSM en France) qui donne une autorisation de fabriquer des médicaments aux industriels s’ils respectent les standards réglementaires. Cette agence fournit aussi une autorisation de distribution des médicaments aux différents acteurs impliqués dans la chaîne de distribution.

De plus, jusqu’à aujourd’hui, certaines informations étaient déjà imprimées sur la boîte de chaque médicament, en particulier le numéro de lot. Cela permettait de suivre les médicaments au niveau du « lot » (ensemble de médicaments fabriqués simultanément, à partir du même mélange de matières premières, dans les mêmes équipements…) afin de vérifier le dossier du lot en cas de réclamation d’un patient ou de rappeler tout le lot en cas de défaut. Mais cette vérification n’était pas systématique et pas immédiate.

Malgré ces mesures, le phénomène de falsification continue de se développer, d’où une volonté de renforcer davantage la traçabilité des médicaments tout au long de leur acheminement jusqu’au patient. Selon la directive européenne, l’obligation d’apposer un numéro unique sur les boîtes de médicaments et de mettre en place un système antieffraction s’applique :

  •  à tous les médicaments soumis à prescription médicale, sauf exception (exemple : les médicaments homéopathiques, les gaz à usage médical…) ;
  • à aucun médicament non soumis à prescription médicale, sauf exception lié au risque élevé de falsification ou au risque encouru par le patient en cas d’utilisation d’un médicament falsifié (exemple : les gélules d’Oméprazole dosées à 20 ou 40 mg).

En France, davantage de médicaments sont concernés. En effet, le numéro unique doit être apposé sur les boîtes de tous les médicaments remboursables et sur le dispositif antieffraction sur les boîtes de tous les médicaments.

Comment la sérialisation fonctionne-elle ?

Le code unique et le système antieffraction sont généralement mis en place sur le conditionnement secondaire du médicament, c’est-à-dire sur les matériaux qui ne sont pas directement en contact avec le médicament comme la boîte (par opposition au conditionnement primaire, qui est directement en contact avec le médicament, comme un flacon ou un blister).

Pour pouvoir mettre en place ces deux systèmes de sécurité, il est donc nécessaire que les industriels adaptent leur méthode et leur matériel de conditionnement. Aujourd’hui, la grande majorité des médicaments sont conditionnés automatiquement sur des machines de production et ne le sont plus manuellement.

Dans le cas du code unique, il est donc nécessaire de s’équiper d’un système capable d’imprimer le code unique tout en communiquant avec les agences du médicament pour recevoir les codes disponibles et envoyer les informations sur les codes utilisés. Cela peut se faire de deux façons :

  • Une impression dite « in-line » : la ligne de conditionnement est modifiée directement pour intégrer les équipements permettant d’imprimer le numéro unique et de placer la languette antieffraction. Ces équipements sont habituellement placés après la mise en boîte et le contrôle pondéral s’assurant que la boîte est pleine. Cette solution a l’avantage d’être plus simple à gérer au cours de la production, mais elle présente un coût d’investissement important puisqu’elle demande de modifier toutes les lignes de conditionnement.
  • Une impression dite « off-line » : les boîtes peuvent alors être pré-marquées avant d’y introduire le médicament ou bien post-marquées une fois qu’elles contiennent le médicament, mais cela se fait en dehors de la ligne de conditionnement, sur un équipement dédié. Cette solution impose des contraintes fortes pendant la production, mais elle se révèle généralement moins coûteuse puisqu’elle ne demande pas de toucher aux équipements existants.

Voici un récapitulatif du déroulement du conditionnement d’un médicament. Les quatre dernières étapes sont illustrées dans la vidéo ci-dessous :

https://player.vimeo.com/video/220797468

 

  • Le conditionnement primaire : le médicament est mis en flacon, en blister…
  • Le conditionnement secondaire : le flacon, blister… ainsi qu’éventuellement la notice et des accessoires (pipette, cuillère…) sont mis dans la boîte.
  • Le code unique est imprimé sur la boîte (sur la vidéo, entre les secondes 1 et 9).
  • Une caméra contrôle la présence du code et sa lisibilité (sur la vidéo, entre les secondes 10 et 17).
  • Pour certains pays, une vignette « produit » est déposée sur la boîte (sur la vidéo, entre les secondes 17 et 25).
  • Le dispositif antieffraction est collé sur la boîte (sur la vidéo, entre les secondes 26 et 41).

Quels sont les enjeux de la sérialisation ?

La sérialisation est une exigence réglementaire, mais elle impose son lot de difficultés, à plusieurs niveaux.

Sérialisation : un enjeu informatique

La mise en place de la sérialisation, avec la génération et la gestion de codes unique, signifie qu’il va y avoir besoin d’une importante et puissante base de données. Les échanges d’informations doivent être optimisés entre les différents acteurs impliqués dans la fabrication et la distribution des médicaments, ainsi qu’avec les autorités de santé.

Par exemple, si un laboratoire sous-traite le conditionnement d’un de ses médicaments, c’est son sous-traitant qui doit réaliser la sérialisation, mais le laboratoire doit être capable de récupérer toutes les données.

Sérialisation : un enjeu pour la mise à jour réglementaire

Boîte de médicament contenant la sérialisation

Ci-dessus, le carton d’une boîte de médicament sérialisée. On peut voir dessus le code GTIN (identifiant unique d’un produit), le numéro de lot, la date d’expiration, le numéro de sérialisation et le code datamatrix encodant ce numéro.

Afin d’être commercialisés, les médicaments doivent recevoir une autorisation de mise sur le marché (AMM), et les autorités conservent alors un dossier sur médicament. Ce dernier contient toutes les informations importantes que le fabricant doit respecter lors de la fabrication, dont certaines concernent les articles de conditionnement.

Si la mise en place de la sérialisation impose de changer ces articles de conditionnement (changement de matière pour pouvoir imprimer dessus, de positionnement de certaines informations pour faire de la place…), la modification doit être approuvée par les autorités avant d’être mise en place. Cela risque de générer une suractivité à la fois pour les laboratoires et pour les autorités afin d’être conformes pour la date de mise en application de la directive. Si cela n’est pas assez anticipé, les médicaments ne pourront plus être commercialisés à partir de février 2019.

Sérialisation : un enjeu logistique

Toute la chaîne de distribution va être impactée, depuis le site de production jusqu’au pharmacien délivrant le médicament au patient. Les interventions sur les produits à tous les niveaux de celle-ci doivent pouvoir être tracées et communiquées au laboratoire exploitant et aux autorités.

Cela peut être le cas lorsqu’un grossiste doit décoliser le médicament pour une commande, c’est-à-dire préparer exactement la quantité commandée même si les produits ont été reçu dans un conditionnement différent (exemple : produits reçus conditionnés en lot de 10, mais décolisés car la commande n’en demande que 5).

La sérialisation aura aussi l’avantage de renforcer la maîtrise de toutes les parties impliquées dans la distribution des médicaments, avec une traçabilité plus précise.

Sérialisation : un enjeu financier

Avec le choix entre un système « in-line » ou « off-line », la mise en place de la sérialisation peut avoir des impacts sur la planification et la durée de production, ce qui influe sur le rendement financier de production.

De plus, cet investissement ne rapportera pas directement d’argent aux industriels, il est seulement nécessaire pour respecter la règlementation. Cependant, il est indispensable pour ne pas en perdre, car un laboratoire qui ne disposerait pas de médicaments sérialisés au 9 février 2019 ne pourrait pas les commercialiser et risque de perdre des parts de marché. Produire les médicaments sérialisés peut à l’inverse lui permettre de regagner les ventes perdues à cause de la contrefaçon.

En suivant directement les boîtes de médicaments, les laboratoires pourront être plus précis en cas de rappel de lot, puisqu’ils seront en mesure de savoir exactement où est chaque boîte et quel est le risque pour le patient. Au niveau de la caisse primaire d’assurance maladie, puisque tous les médicaments remboursés sont sérialisés, la fraude au remboursement devrait aussi être mieux maîtrisée.

Vous savez maintenant ce qu’est la sérialisation des médicaments, son but et les enjeux qu’elle présente déjà aux industriels même si cette modification ne changera rien pour le patient. Aviez-vous déjà entendu parler de la sérialisation ? Pensez-vous que cette mesure soit efficace pour lutter contre la falsification des médicaments ? Dites-nous tout dans un commentaire !

Ursuline

Sources texte :

ansm.sante.fr

– ec.europa.eu 1 et 2

hubone.fr

industrie.com

Sources images :

Image 1

Image 2

– Image 3 : montage entre cette image et cette image

2 réflexions sur “La sérialisation des médicaments pour lutter contre la falsification”

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