Anathema, entre tristesse et magnificence

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Parmi les nombreux groupes de rock et de metal, il y en a certains qui aiment expérimenter et qui n’ont pas peur d’évoluer au fil de leurs albums. C’est le cas d’Anathema, un groupe anglais qui a produit des albums aux styles très différents. Toujours chargée de beaucoup d’émotion, la musique d’Anathema fait vibrer la corde sensible de l’auditeur. À l’occasion de la sortie de leur nouvel album en juin, je vous invite à découvrir dans cet article un groupe très particulier. 

Histoire du groupe 

Les membres d'Anathema à leurs débuts

Anathema est un groupe anglais originaire de Liverpool, créé en 1990. Il est composé à l’origine par Darren White au chant, par John Douglas à la batterie et par les frères Cavanagh : Vincent et Daniel aux guitares, Jamie à la basse. Ce dernier quitte le groupe un an plus tard et est remplacé par Duncan Patterson.

Le groupe ainsi constitué sort en 1992 son premier extended play (EP), The Crestfallen, suivi l’année suivante par son premier album Serenades. Après un second EP intitulé Pentecost III en 1995, Darren White quitte le groupe. Vincent Cavanagh devient ainsi le chanteur du groupe, tout en gardant son rôle de guitariste. Sous cette nouvelle formation, Anathema sort trois albums : The Silent Enigma (1995), Eternity (1996) et le très remarqué Alternative 4 (1998) qui remporte un grand succès critique. Duncan Patterson, le bassiste et principal compositeur d’Anathema, quitte alors le groupe suite à des divergences artistiques, et fonde Antimatter. Il est remplacé par Dave Pybus pendant quelques années, puis par Jamie Cavanagh qui fait ainsi son retour dans la formation.

Judgement, le cinquième album du groupe, sort en 1999 et rencontre lui aussi le succès auprès de la critique et des amateurs de metal. À partir de 2001, Anathema se voit enrichi d’une chanteuse supplémentaire, Lee Douglas (la sœur du batteur du groupe), et d’un claviériste en la personne de Les Smith, remplacé ensuite par Daniel Cardoso après 2012. Le groupe sort alors deux albums : A Fine Day to Exit (2001) et A Natural Disaster (2003).

Le groupe connaît ensuite une certaine traversée du désert, seul suite à la disparition de son label, Music For Nation. Anathema finit par signer chez Kscope et sort en 2010 le tant attendu We’re Here Because We’re Here, huitième album studio de la bande. Viennent ensuite deux autres albums : Weather Systems (2012) et Distant Satellites (2014).

Anathema a annoncé la sortie de son 11e album studio, The Optimist, le 9 juin prochain. Bien que le groupe demeure méconnu du grand public, il a acquis une certaine renommée dans la communauté metal et compte de nombreux fans. Une grande tournée européenne suivra, en compagnie d’Alcest qui jouera en première partie.

Styles musicaux et influences

Vincent Cavanagh Anathema

Dans le monde de la musique metal, il est courant de voir des groupes faire évoluer leur musique, souvent de l’extrême vers des styles plus doux. Cependant, rares sont ceux qui, malgré tout, ont réussi à conserver l’essence de leur musique, leur « son » reconnaissable entre tous, mais Anathema en est l’un des exemples les plus aboutis.

À ses débuts, Anathema fait partie des groupes pionniers d’un nouveau genre, le death-doom, mélange de doom metal pour la lenteur des mélodies et du death metal pour le chant guttural. Pour plus d’informations sur ces termes, je vous invite à lire l’article consacré aux genres du metal.

Le groupe abandonne progressivement ce genre lorsque Darren White quitte le groupe. En effet, Vincent, qui reprend le chant, opte plutôt pour un chant clair qu’il perfectionnera au fil des albums. The Silent Enigma constitue donc le premier changement dans la carrière d’Anathema. Néanmoins, cet album ainsi qu’Eternity proposent tout de même des compositions dans la continuité de Serenades : complexes et expérimentales, elles sont toujours imprégnées par le doom metal des débuts.

Alternative 4 représente le deuxième grand tournant d’Anathema. Le son devient beaucoup plus épuré qu’auparavant, l’accent est mis sur le chant. L’album relève davantage du metal alternatif : metal dans l’esprit des compositions, mais de plus en plus proche du rock dans les sonorités. On y sent notamment une grande influence de Pink Floyd.

Au fil des albums suivants, le style d’Anathema devient de plus en plus « lumineux » et s’apparente désormais au rock alternatif et progressif, influencé par des groupes comme Radiohead et Porcupine Tree. La musique électronique prend également de plus en plus de place dans les derniers albums, notamment sur le dernier en date, Distant Satellites.

Néanmoins, si la musique du groupe a fortement évolué, elle conserve un son caractéristique : des guitares planantes et atmosphériques, un chant très présent (renforcé par le duo Vincent/Lee) et une qualité indéniable des compositions. Mais ce qui fait surtout la force d’Anathema, c’est l’intensité émotionnelle de sa musique. Chaque chanson est tellement vibrante d’émotion qu’elle vous donne facilement la chair de poule ou, pour les plus sensibles, vous fait monter les larmes aux yeux. Il y a une véritable souffrance dans les textes et dans la musique du groupe. Le pessimisme, la solitude, l’abandon et le désespoir sont des thèmes récurrents des chansons d’Anathema ; mais c’est tout ce qui fait la beauté de la musique du groupe.

Quelques chansons à découvrir

Au vu de l’ampleur de la discographie d’Anathema et de l’évolution de son style, il est très difficile de faire une sélection représentative de la diversité des chansons écrites par le groupe. Je vous présente donc ici trois titres qui me semblent incontournables parmi les albums les plus emblématiques.

« Fragile Dreams » sur Alternative 4

« Today I introduced myself
To my own feelings
In silent agony, after all these years
They spoke to me… after all these years

Maybe I always knew
My fragile dreams would be broken… for you »

[Aujourd’hui je me suis présenté / Devant mes propres sentiments / Dans une agonie silencieuse, après toutes ces années / Ils m’ont parlé… après toutes ces années / Peut-être ai-je toujours su / que mes rêves fragiles seraient brisés… pour toi]

Difficile de choisir un extrait de l’album Alternative 4 tant celui-ci figure parmi les meilleurs albums d’Anathema et, à titre personnel, parmi mes albums préférés tous genres et artistes confondus. L’album aborde à de nombreuses reprises les thèmes de la trahison, du regret, de la solitude et du désespoir. On y sent encore l’énergie des premiers albums, notamment sur le fameux « Fragile Dreams », l’une des chansons les plus connues d’Anathema ; pendant longtemps, le groupe la jouait d’ailleurs à chaque fin de concert.

Dans « Fragile Dreams », il est question d’une personne qui, visiblement, s’est rendu compte à quel point elle a pu s’engager dans une relation toxique. Elle a sûrement beaucoup souffert de la rupture mais, aujourd’hui, elle sait qu’elle aurait « brisé ses rêves » pour quelqu’un qui ne la méritait pas.

« One Last Goodbye » sur Judgement

« Somehow I knew you would leave me this way
Somehow I knew you could never… never stay
And in the early morning light
After a silent peaceful night
You took my heart away
And I grieve »

[Quelque part je savais que tu allais me quitter de cette façon / Quelque part je savais que tu ne pouvais pas rester / Et dans la lumière de l’aube / Après une nuit silencieuse et paisible / Tu as pris mon cœur / Et je crève de douleur]

Judgement a été composé juste après la mort de la mère des frères Cavanagh. L’album traite donc principalement de la perte et du deuil. On y trouve des morceaux énergiques où l’influence de Pink Floyd se fait fortement sentir, comme par exemple le magnifique « Deep », mais aussi de superbes ballades comme « One Last Goodbye ». Dans cette chanson écrite et composée par Danny Cavanagh, il s’adresse à sa mère défunte. Il exprime sa douleur et le vide immense qu’a laissé cette femme dans sa vie. Il explique qu’au fond, il savait qu’elle mourrait un jour, mais, en mourant, elle lui a quand même « pris son cœur ». En pensant à elle, il est partagé entre l’amour qu’il éprouvait pour elle et la douleur du deuil, d’autant plus qu’il rêve d’elle. Au réveil, la réalité de sa disparition est donc encore plus difficile à admettre.

« Thin Air » sur We’re Here Because We’re Here

« And it feels like we’re already flying
But the air is too thin and we’re dying
The clouds all around take us higher
The world far below is on fire
I hold out my hand just to touch you
And all that I know is I love you
A vision a promise of heaven
A reason for being forever »

[Et c’est comme si nous étions déjà en train de voler / Mais l’air est trop mince et nous sommes mourants / Les nuages alentour nous emmènent plus haut / Le monde loin au-dessous est en feu / Je tends ma main juste pour te toucher / Et tout ce que je sais c’est que je t’aime / Une vision, une promesse de paradis / Une raison d’être éternellement]

We’re Here Because We’re Here a été tellement long à sortir que le degré d’attente des fans était immense. Pour leur plus grand bonheur, ils n’ont pas été déçus ! L’album est rempli de très bons morceaux et est surtout très cohérent de bout en bout. Il marque également le début d’une nouvelle aire musicale pour le groupe, avec un rock très atmosphérique et progressif. Les orchestrations sont plus présentes. La musique et les paroles sont également beaucoup plus « lumineuses » : là où il ne régnait souvent que douleur et désespoir, We’re Here Because We’re Here paraît être un hymne vibrant à l’amour et à la vie.

« Thin Air » est le premier titre de l’album, et quelle ouverture ! La tension augmente progressivement jusqu’à littéralement exploser. On a seulement envie de fermer les yeux et de se laisser porter par la musique d’Anathema. Cette chanson est une déclaration d’amour d’une personne qui se rend compte à quel point il est grisant d’aimer et d’être avec la personne aimée.

Voir Anathema en concert

Anathema concert Dublin Resonance tour

Resonance tour, Dublin, 2015

En 2015, j’ai eu la chance de voir, à Dublin, l’un des concerts de la tournée exceptionnelle Resonance à l’occasion des 25 ans d’Anathema. Pendant 3 heures, le groupe a retracé sa discographie, de Distant Satellites à Serenades, avec la présence de Duncan Patterson (l’ancien bassiste) et Darren White (le premier chanteur).

Les morceaux que j’avais tant écoutés ont vraiment pris une autre aura lorsque je les ai entendus joués en live, avec l’émotion combinée des musiciens et du public. Ce concert figure parmi ceux qui m’ont le plus émue et marquée.

J’ai donc d’ores et déjà acheté ma place pour voir Anathema lors d’une de leurs prochaines dates en France. Si vous êtes intéressé, voici les dates de la tournée The Optimist en compagnie d’Alcest.

Affiche de la tournée européenne The Optimist d'Anathema

En conclusion, Anathema est donc un groupe qui a toujours su aller de l’avant et évoluer au gré de ses inspirations et de ses envies. Qu’importe ce qu’en pensent leurs fans de la première heure, les membres d’Anathema font de la musique avant tout pour eux-mêmes, quitte à ce qu’elle ne plaise plus à leur auditoire. C’est une qualité rare, qui plus est quand on arrive à conserver une qualité musicale indéniable et un son identifiable depuis plus de 25 ans de carrière. Anathema demeure pourtant un groupe méconnu, alors qu’il mériterait d’être cité comme l’un des meilleurs groupes anglais actuels. Amateur de rock et d’émotions musicales, n’hésitez plus : écoutez Anathema !

Et vous, connaissiez-vous ce groupe anglais ? Cet article vous a-t-il donné envie d’écouter Anathema ? Partagez vos impressions dans les commentaires.

Sonatine

Sources texte :

Sources des images :

2 thoughts on “Anathema, entre tristesse et magnificence”

  1. C’est bizarre je pensais les connaitre en voyant leur nom et la photo du groupe mais non je confonds je pense, merci pour cette découverte du coup 🙂

     

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