L’art de parler québécois : leçon #3

Art de parler québécois
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Art de parler québécois

Et c’est reparti pour le troisième épisode ! Avouez quand même que vous vous ennuyiez de nos expressions pour le moins étranges, de nos anglicismes pour le moins nombreux et de notre accent pour le moins… charmant ! Un petit voyage dans le nord Américain vous donnerait peut-être le tournis, mais, heureusement, je suis là pour vous sauver la mise ! Néanmoins, vous avez beau connaître les mots et les expressions, si vous ne connaissez pas le contexte, alors vous pouvez dire adieu à votre tentative de camouflage ; les seuls mots qui traverseront la barrière de vos lèvres seront soit « Hein ? », soit « Pas compris », soit « Pourquoi on ne m’a pas dit que mon avion changeait de destination pour la Chine ?! » ou toute autre expression qui pourrait soulager votre détresse et votre frustration de ne pas comprendre le Québécois. Alors, qui dit nouvelle leçon dit… Nouveau concept ! Je sens déjà la curiosité flotter dans l’air… Je vous souhaite donc bonne lecture et bon apprentissage !

Une journée dans la peau d’une adolescente québécoise…

6H00. Le cadran sonne… ou pas. S’il ne le fait pas, l’adolescente québécoise se fait réveiller par un membre de sa chère et tendre famille. Dans l’autre cas, elle prend le cadran et le garoche sur un mur en chialant (non non, elle ne pleure pas, elle se plaint, c’est tout) que l’école, c’est vraiment poche. Dès que l’adolescente sort un pied de sous les couvertures, le deuxième obstacle de sa journée se présente : plus abriée, il fait frette dans la chambre ! Puisque la Québécoise ne râle pas, elle chiale. Encore. Et c’est le début de la phase : « MOM ! J’peux pas aller à l’école, j’suis malade (tousse) ». Qui a pour réponse la même que les quatre jours précédents : « Ben oui, c’est ça ». L’air bête en prime. L’adolescente québécoise est tannée. Oui, vraiment écœurée de se lever tôt le matin pour aller gaspiller sa journée à l’école. Elle pourrait skipper, mais elle se ferait chialer par ses parents quand la secrétaire appellerait à la maison pour signaler son absence.

6H15. Oui oui, tout ce qui précède le 6H15 se déroule en une quinzaine de minutes. L’adolescente québécoise ne niaise pas. Tous les moyens sont bons pour éviter d’aller à l’école… Donc, 6H15. L’adolescente québécoise est maintenant assurée qu’elle va en cours aujourd’hui. Vient le moment critique : celui de choisir le linge qu’elle va porter. Alors, elle choisit un chandail à manches longues, des skinny (oui, DES, c’est comme cela que l’adolescente québécoise le dit bien qu’elle ne porte qu’un pantalon) et des bas. Des bas ? Oups, non. Plutôt des chaussettes.

6H30. L’adolescente québécoise vient de réaliser qu’elle a oublié de prendre sa douche. Sauf qu’elle est déjà en retard. Elle se lave en vitesse, puis remet son linge. Troisième obstacle de la journée : aplatir des cheveux mouillés. Elle pèse sur le bouton On de son fer. En attendant qu’il chauffe, elle se maquille à botch. Pas étonnant qu’elle se trouve un air de ressemblance avec un raton laveur, par la suite. Donc, elle aplatit ses cheveux pour qu’ils soient bien raides, puis, bien sûr, elle oublie de peser sur Off. Bonjour l’odeur de brûlé qui l’attend à son retour !

6H59. Il n’est pas encore 7H00, c’est bon signe ! Elle descend les escaliers.

6H60. Ah non. 7H00. Un sacre par-là, par-ci, le fameux 7H00 est arrivé. Le bus* (accent québécois s’il-vous-plaît, on dit comme un « bosse ») arrive dans dix minutes. L’adolescente met un bagel dans le toaster. Sort le Nutella. Ah non, elle est au régime ! Elle enlève le bagel, prend une cuillère, mange le Nutella à même le pot. Mais oh ! Distraction ! Elle vient de recevoir un text sur son Blackberry. Elle shake, tellement elle espère que c’est LUI ! Bientôt, elle le sait, ce sera son chum (utilisons un peu de vos apprentissages passés !).

« T’as-tu fait ton devoir de math, toi ? »

Déception. C’est juste cette fille, tellement faticante, qui suit l’adolescente québécoise partout. Pas parce qu’elle l’admire, non. Parce que l’adolescente québécoise est une bollée de la vie (ou de la mort, qui sait…). Elle remet son cellulaire dans sa poche et finit son déjeuner.

7H10. L’adolescente québécoise brette à l’arrêt de son bus. Quand, finalement, il arrive, elle a déjà eu beaucoup de temps pour regretter de ne pas avoir sa mopette ou son char.

Parler québécois

7H45. Arrivée à la polyvalente, ou école secondaire. Première vision ? Le regroupement de fumeurs devant l’école, à une distance respectable d’au moins neuf mètres de toute sortie/entrée de l’établissement (c’est la loi qui le veut !). Avec leur smoke entre les doigts, plusieurs jouent au bum (ahhhh, les rebelles…) en distribuant aux élèves des beaux fuck you. Ou doigt d’honneur. Enfin, le geste universel pour envoyer quelqu’un paître. Ça va, je ne vous ai pas… largué ? Poursuivons, donc !

8H00. Dans certains établissements scolaires du Québec, les cours ont déjà débuté. Mais pas dans celui de l’adolescente québécoise dont nous suivons le parcours aujourd’hui. À 8H00, elle est à son casier, après faire sa combinaison de cadenas. 05-35-11. Son Blackberry vibre dans ses culottes (là, je ne parle pas de ses sous-vêtements, entendons-nous bien là-dessus !). L’adolescente québécoise regarde le numéro qui s’affiche à l’écran :

(726) 627-8274 *

Numéro inconnu = rejet d’appel. La prudence est mère de sûreté.

8H40. Les quarante dernières minutes ont été consacrées à la propagation des potins ou, comme l’adolescente québécoise les appelle, toutes les bullshit sur les autres que les étudiants se démènent à répandre à droite et à gauche. Jusqu’à ce que la cloche sonne et que tous se dirigent vers leur classe, sous peine d’avoir une belle retenue. L’adolescente québécoise est en mathématiques à la première période. Elle prend ses choses et entre dans le local.

9H55. Cours de mathématiques terminé. 75 minutes à fuckall faire, parce que l’adolescente québécoise n’a plus rien à apprendre. Dans son devoir, elle a eu 93%. Soit, si on le convertit, un A et aussi la meilleure note de la classe. Que demander de mieux ? Commence maintenant la pause de 15 minutes, suivie des 10 minutes pour se rendre à son prochain cours*.

10H00. L’adolescente québécoise s’astine sur la fin d’un téléroman avec son amie. Cette dernière dit que l’homme ne peut pas manquer l’énorme hickey qui orne le cou de sa femme. La première réplique que la femme pourra très bien prétendre s’être brûlée avec son fer à lisser. Un nouveau débat s’ouvre alors : est-ce que l’excuse de la brûlure est crédible ou non ? Bonne question…

10H15. La deuxième période débute. L’adolescente québécoise entre dans la classe en même temps que son professeur d’histoire. Quel sens du timing ! 

11H30. C’est l’heure du dîner ! Le dîner ? Eh oui, le dîner ! Je vous rappelle que le déjeuner, c’était à 7H00 ce matin ! L’adolescente réfléchit à ce qu’elle a appris dans son cours d’histoire du Québec : la guerre de la Conquête, l’Acte Constitutionnel, l’Acte de Québec, la révolution des Treize Colonies… Dans cet ordre ? Peut-être pas… Tsé – tu sais –, l’adolescente québécoise en a tellement à retenir ! Sa mère lui a fait beaucoup de speech là-dessus, justement. Un manque de concentration signifierait, apparemment, qu’elle va failer son année. Redoubler, quelle horreur !

11H37. Elle se rend à la cafétéria pour manger et s’assit avec un ami et sa blonde. Cette dernière est, aux yeux de l’adolescente québécoise, vraiment weird, étrange, bizarre, et puis tous les synonymes que ce mot peut avoir ; avec ses deux sacs en plastique, l’un contenant son dîner et l’autre contenant un dîner de spare, sa prudence n’est pas mère de sûreté. Elle est mère de ridicule. Cela promet d’être une heure pleine de surprises !

12H40. Fin du dîner et début du cours. La cloche retentit, les élèves se pressent – ou pas – vers leur troisième et avant-dernière période. L’adolescente québécoise a soudain un down. Ses pieds traînent sur le plancher, bien au chaud dans leur Puma à 100 piastres (100 $). Son regard morne se pose sur son casier, examinant le cadenas qui est le quatrième obstacle de la journée de l’adolescente québécoise : se souvenir de sa combinaison. Bien sûr, ce matin, elle l’a fait plusieurs fois sans y penser. Et c’est justement le truc ! Car l’adolescente québécoise tourne la roulette sans penser aux chiffres. Mais dès qu’elle essaie de se souvenir de ceux-ci, pouf ! Blackout total. Au hasard, elle tourne donc la roulette et tire. Clic. Le cadenas s’ouvre. Soulagement. La retenue, ce sera pour un autre jour…

Combinaison parler québécois

13H55. Cours d’art dramatique terminé. L’adolescente a faim, mais il ne lui reste plus rien dans son sac. Elle prend donc de l’argent et va au dépanneur, proche de l’école. Elle s’y prend un muffin à 5 $. Tout devient de plus en plus dispendieux, comme si tout le monde avait de l’argent à jeter par les fenêtres… ou les moyens de se faire crosser pour un muffin (les esprits mal tournés peuvent retourner se cacher !).

14H15. Dernier cours de la journée : français. Dans ce cours, l’adolescente québécoise jase souvent avec les autres parce qu’elle est douée. Comment ça, vous en doutez ? Rassurez-vous, l’adolescente québécoise fait des exercices pour se débarrasser de ses anglicismes à l’écrit ! 

15H30. Pour la dernière fois de la journée, on entend la cloche. Et cette cloche-ci, l’adolescente québécoise l’adore. Plus besoin de travailler ! Seul point négatif ? Elle doit reprendre le bus, et espérer, pendant tout le trajet, l’invention prochaine de la machine à téléportation. Avant d’aller attendre cette grosse boîte jaune à roues, elle s’arrête à l’abreuvoir pour boire un peu. Les efforts ont été exténuants aujourd’hui.

Parler québécois 3

16H00. L’adolescente québécoise débarque de l’autobus et, entrée dans la maison, va à la toilette (elle s’est retenue toute la journée parce que les toilettes de l’école lui inspirent méfiance !). Elle allume l’ordinateur, direction MSN et Facebook. Sur ce dernier, elle apprend qu’un inconnu est chaud et qu’une inconnue est gelée (vous ne vous souvenez plus ce que cela signifie ? Par ici !). Enthousiasmée par ces découvertes de grande importance (un peu de sarcasme n’est jamais de trop), l’adolescente québécoise écrit sur son mur qu’elle est enfin à la maison. Comme si ce n’était pas le cas des 1499 autres élèves de son école…

17H30. Les parents de l’adolescente québécoise rentrent à la maison, en furie, et se maudissent d’avoir choisi des jobs aussi emmerdantes. Point positif ? Ils ont ramené de la poutine, parce que cuisiner n’était pas dans leurs cordes ce soir. Attention, haute gastronomie en vue pour le souper de ce soir ! Bon appétit !

17H35. Le souper est déjà terminé, mais le ventre de l’adolescente québécoise s’est tu. Il est vrai que, pour calmer un estomac en quelques minutes, rien de mieux qu’un peu de poutine bien grasse… L’adolescente québécoise entreprend la lutte en elle-même pour débuter ses devoirs.

19H00. Les devoirs sont finalement terminés. L’adolescente québécoise retourne sur Facebook pour voir ses notifications. Mais les soirs de semaine, tout est calme. Alors, elle décide d’aller courir une heure. C’est comprenable, puisqu’elle veut se débarrasser d’un peu de son ventre.

20H00. L’adolescente québécoise a sué. Elle décide donc de prendre une douche. Elle ouvre la champlure à l’eau tiède.

20H30. Une heure avant d’aller faire dodo. Oui, c’est tôt, mais demain, il faut se lever à 6H00 ! Sa mère l’achale toujours pour qu’elle se couche à 21H00. Mais il y a toujours bien une limite ! Et puis, elle est censée LE voir, demain, s’il ne la choke – tchöque – pas. Ahhh, ce que c’est beau, l’amour !

21H00. L’adolescente québécoise décide d’écouter une émission à la télévision. Si, avec des images. C’est écouter, pas regarder !

21H30. Fais dodo, Colas mon p’tit frèreeeeeuh, fais dodo, t’auraaas du loloooooo !

Et c’est la fin de la journée de l’adolescente québécoise…

 

En espérant que vous ayez passé une bonne journée en compagnie de notre chère adolescente québécoise fictive !

*Le ou la « bus », le déterminant dépend de la région où il est utilisé.

*Les chiffres du numéro de téléphone sont tout droit sortis de mon imagination, mais pas la disposition. Entre les parenthèses, on met le code régional composé de trois chiffres. Puis, la première série de chiffres en est aussi composée de trois, suivie d’un tiret. Puis, les quatre derniers numéros.

*Les horaires de cours sont basés sur mes propres horaires, mais ceux-ci peuvent varier selon l’établissement scolaire.

Jorkane

Sources images :

 – Image 1

5 réflexions sur “L’art de parler québécois : leçon #3”

  1. Oh, chaud comme exercice, faut se concentrer pour suivre! D’ailleurs, je n’ai pas tout compris! Mais il y a beaucoup de mots du « quotidien » qui diffèrent en fait! Je reste fan du « char » personnellement :p
    En tout cas encore un article intéressant, dommage que dans le série on n’ait pas eu une fois une démo « parlée », ça aurait été l’occasion ^^ Merci en tout cas pour ces 3 articles!

     
  2. Wow Ursuline ! Tu m’impressionne. Tu as vraiment lu les trois articles en une soirée ? x)

    En effet, le niveau de difficulté est de plus en plus élevé au fil de la série. Ce n’était pas spécifiquement voulu, puisque la deuxième et troisième leçon sont en fait des archives de la Gazette ! (a)

    J’ai complètement refait le premier pour l’occasion (en plus du fait qu’il datait de ma candidature à la Gazette, donc ouf pour le style quoi :’)) mais voilà, ceux-là sont presque des c/c de ce que j’avais fait pour la Gazette ! En tout cas, ravie que ça t’ais plu, et merci pour tes commentaires comme d’hab. <3

     
  3. Bah j’avais pris du retard dans ma lecture, j’voulais le rattraper! (a) Puis une fois commencé, on ne s’arrête plus, c’est vraiment accrocheur comme style et thème! En tout cas j’adore, merci beaucoup!

     
  4. MrsMinette

    J’ai adoré cet article !! Le vocabulaire est tellement … similaire et différent à la fois ! Haha !!!

    Ton style d’écriture est vraiment fou ! 🙂

     
  5. En effet, c’est la même langue mais on a nos petites expressions à nous ahah
    Ravie que tu ais apprécié en tout cas ! 😀

     

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