Les Trotteurs Français sont des chevaux exceptionnels qui ont donné des champions hippiques de légende. Le plus connu est bien sûr Ourasi, mais il est loin d’être le seul. Je vous propose de découvrir ou redécouvrir trois trotteurs mythiques : Uranie, Une de Mai et Jag de Bellouet !
Premier Trotteur Français de légende : Uranie
Uranie était une jument Trotteur Français alezane née en 1920. Son père était un étalon alezan spécialisé en courses de trot, nommé Intermède. Il a donné de nombreux poulains, surtout entre 1914 et 1934, après sa carrière sportive. Au total, il a produit environ 120 poulains, dont plusieurs ont fait du trot attelé à un bon niveau.
La mère d’Uranie était une jument alezane nommée Pastourelle. Uranie était sa première pouliche, née alors qu’elle n’avait que cinq ans. Elle a donné deux autres poulains en 1930 et 1936.
Uranie commença sa carrière avec Lucien Dufour, qui fut son premier meneur en course officielle. Dès ses débuts, elle montra un grand potentiel, en remportant à seulement 3 ans de grandes courses, comme le Prix de Jumièges, le Prix de Vincennes ou le Prix d’Amiens par exemple. Elle parvint toujours à être bien classée et rapporta 43 635 anciens francs de gains à son propriétaire cette seule année.
L’année suivante, en 1924, elle a été vendue à monsieur Vanackère, qui la confia à Valentino Capovilla pour exploiter tout son potentiel. Il repéra rapidement ses capacités hors du commun, mais le caractère de la jument la rendait difficile à contrôler et lui imposait une rigueur impressionnante pour éviter les fautes. La jument continua de progresser et s’assagit. Elle devint très populaire auprès des amateurs de trot, grâce à sa facilité à remporter les courses et à son trot aérien.
Rapidement, Uranie devint presque imbattable, devançant les meilleurs chevaux de l’époque : Tienneval, Re Mac Gregor, Roi Albert, Passeport… Tous étaient présents lors du Prix d’Amérique de 1926, remporté par la jument alezane. Les deux années suivantes, elle a continué de faire des performances remarquables, multipliant les podiums et allant jusqu’à rapporter plus de 230 000 anciens francs de gains au cours de la seule année 1927.
Ses performances les plus mémorables sont ses participations au Prix d’Amérique. Elle l’a remporté en 1926, 1927 et 1928, c’était le premier cheval à parvenir à l’inscrire trois fois à son palmarès, même si elle a été battue depuis par Ourasi, qui l’a remporté quatre fois (1986, 1987, 1988 et 1990). En 1929, elle a failli gagner : elle était 75 m devant ses concurrents jusqu’au poteau d’arrivée, qu’elle a malheureusement franchi au galop, ce qui lui a valu une disqualification. En 1930, pour sa dernière participation, elle termina sur la deuxième marche du podium du Prix d’Amérique, derrière Amazone B.
Au cours de sa carrière, Uranie a rapporté près de 5,6 millions d’anciens francs de gains en France et a dépassé les 900 000 anciens francs de gains à l’étranger, principalement en Italie, en Autriche et en Angleterre.
À 10 ans, elle s’est retirée des hippodromes et est devenue poulinière. C’est la mère des deux célèbres trotteurs, Kairos et Ogaden. Le premier a de nombreux descendants connus. Il est, par exemple, le père de Gelinotte, une grande trotteuse des années 50, et le grand-père de Roquépine, l’une des meilleures trotteuses des années 60.
Uranie est morte en 1947, à 27 ans, après de belles années de retraite en haras.
Deuxième Trotteur Français de légende : Une de Mai
Une de Mai est une jument aux origines modestes. Sa mère, Luciole III, qui n’a jamais couru, a été achetée par un boucher vendéen qui a décidé de la faire pouliner. Il a cherché un étalon pas trop cher, qu’il a trouvé en Kerjacques. Il fit ainsi naître, en 1964, une petite pouliche alezane aux grandes oreilles, mais avec un défaut d’aplomb
Ce physique ne semblait pas la prédisposer à un grand avenir, il la vendit donc rapidement à Michel Lemeltier, qui la revendit peu de temps après à Pierre-Désiré Allaire. Ce dernier était à la recherche de poulains de Kerjacques, après avoir débourré l’un d’eux qui semblait avoir un très gros potentiel.
Lorsqu’elle fut mise au travail, Une de Mai se révéla être une vraie jument : nerveuse, imprévisible, elle empêchait même souvent ses soigneurs d’entrer dans son box et tirait beaucoup à l’entraînement pour prendre la main. Malgré cela, Pierre-Désiré Allaire croyait en elle et réussit à convaincre le comte de Montesson d’en acheter la moitié pour 200 000 francs en 1967.
Par la suite, Une de Mai fut confiée à Jean-René Gougeon, qui fut entraîneur et driver (personne assise sur le sulky tiré par le cheval, elle dirige et contrôle l’équidé) de grands champions au cours de sa carrière (Ourasi, Roquépine, Bellino II…), mais a toujours avoué qu’Une de Mai était sa préférée. Jean-Louis Peution devint le lad (driver d’entraînement, il a aussi un rôle de soigneur) de la jument, c’est la seule personne avec qui la jument a créé une véritable alchimie. Cet environnement de travail transforma la jument et elle décrocha alors sa première victoire internationale à Milan, en remportant le Prix d’Europe.
À 3 ans, la jument excelle à la fois montée et attelée, en gagnant le Critérium des 3 ans attelée et l’équivalent montée, le Prix de Vincennes. Elle réussit partout, jusqu’à l’année suivante où son premier rival de taille apparut : Upsalin. Il l’a battue à plusieurs reprises, en particulier lors du Prix d’Amérique en 1969. Malgré cela, elle continua de remporter de nombreux titres, en France et à l’étranger.
L’un de ses titres les plus prestigieux est celui remporté en 1969 aux États-Unis, lors des Championnats du monde. Nevele-Pride était largement favori, reconnu comme l’un des meilleurs chevaux américains de ces 30 dernières années, très en forme (il l’a prouvé quelques jours après les Championnats du monde en battant le record du monde de trot attelé établi 31 ans plus tôt). Mais Une de Mai a saisi sa chance et l’a battu sur ses terres, gagnant ainsi énormément en popularité aux États-Unis. Une de Mai est aussi très connue pour ses performances au Grand Critérium de Vitesse de Cagnes-sur-Mer, qu’elle a remporté 5 fois, un record.
Entre 1969 et 1973, elle a gagné presque tous les Grands Prix internationaux : Prix de Paris, Prix de France, Prix de l’Atlantique, Prix de Vincennes, Prix d’Europe, Grand Prix des Nations (Italie), Prix des Meilleurs (Allemagne), Grand Prix des Pays-Bas (Pays-Bas), Grand Circuit Européen (Europe), International Trot (USA).
Le seul titre qui manque à son palmarès est le Prix d’Amérique, qu’elle n’a jamais remporté malgré six participations. Elle est montée sur la deuxième et la troisième marche du podium, respectivement en 1969 et en 1971, mais n’a jamais fait mieux. Certains spécialistes ont dit que ses aplombs défectueux étaient peu compatibles avec la montée de la piste de Vincennes et que la jument préférait les pistes plates où elle pouvait faire de la vitesse pure. Ce titre manquant lui a valu le surnom de « Reine sans couronne ».
La carrière de Une de Mai a pris fin en 1974, après avoir couru 149 courses, en avoir remporté 74 (dont 43 en France et 31 à l’étranger) et être montée au total sur 117 podiums. Elle a accumulé près de 9 millions de francs de gains. Elle a été envoyée au haras des Coudraies, où Jean-Louis Peupion a continué à lui rendre visite. On lui promettait une carrière de poulinière, mais elle a malheureusement avorté de Nevele-Pride, avant d’être pleine par Quioco. Malheureusement, un mois seulement après la mise bas de sa pouliche, May-Flower, Une de Mai est morte des suites d’une déchirure à l’estomac.
Un prix Une de Mai a été créé pour lui rendre hommage. Il s’agit d’une épreuve réservée aux pouliches de 2 ans disputée sur 2 175 m tous les ans à Vincennes. Salvador Dali a lui aussi été impressionné par la jument et l’a représentée dans un portrait en 1972, où il mêlait photographie et lithographie.
Troisième Trotteur Français de légende : Jag de Bellouet
Jag de Bellouet est né en mai 1997 à Argentan, en Normandie. Fils de Viking’s Way et de Vaunoise, il a de bonnes origines, comptant entre autre Ua Uka, Sabi Pas et Nevele-Pride parmi ses ascendants.
Il doit son nom à ses propriétaires : Jean-Claude Monthéan a voulu ajouter au « J » obligatoire pour les trotteurs nés cette année-là et initiale de son prénom, les deux premières lettres du prénom de sa femme, Agnès : le nom « Jag » est apparu.
Il a rapidement été vendu à Nadia Izard pour 44 000€, Michel Gallier ayant repéré le potentiel du jeune cheval et ayant convaincu cette femme de l’acquérir. Jag avait un beau modèle : grand et puissant, il était pourtant peureux et faisait souvent des fautes. Le fils de Michel Gallier, Christophe, prit en charge l’entraînement du cheval bai et devint aussi son driver pour les courses attelées. Lorsqu’il est monté, Jag est confié à Matthieu Abrivard, un jeune cavalier.
Jag commença à courir en 2000, à 3 ans. Il gagna quelques courses montées et semblait bien parti pour faire de belles choses. L’année suivante, il ne couru presque qu’attelé, mais ne parvint pas à se démarquer. En 2002, alors qu’il devrait gagner en aisance, il continuait à être souvent distancé et à faire des fautes.
C’est à partir de 2003 qu’il fit moins de fautes. À 6 ans, Jag venait de terminer sa croissance, il a gagné en puissance et en sagesse. L’année de ses 7 ans a été celle de sa révélation au public. Sur les 13 courses auxquelles il a participé, il en a remporté 11, dont le Prix de Cornulier (l’une des courses de trot monté les plus prestigieuses), le Prix de Paris ou encore le Prix de l’Atlantique. Il se classa aussi 3e au Prix d’Amérique alors qu’il faisait partie des favoris, après un départ catastrophique qui lui a fait perdre 75 m. Il commençait à avoir des fans et à montrer tout ce dont il est capable. Il était même considéré comme le meilleur Trotteur Français, devant Késaco Phédo, après l’avoir battu au Prix de l’Atlantique avec une facilité déconcertante, en établissant le 3e meilleur temps de la course.
Lors de la seule année 2004, Jag de Bellouet a rapporté 900 000€, en remportant entre autres le Prix de l’Atlantique, le Prix Cornulier et le Prix d’Amérique. C’est l’un des rares chevaux à parvenir à inscrire le doublé de ces deux dernières courses à son palmarès, seuls Venutar, Masina, Tidalium Pélo et Bellino II l’avaient fait avant.
En 2006, Jag remporta son 3e prix de l’Atlantique et son 3e prix de Cornulier consécutifs, ce qui est exceptionnel. Il termina aussi premier au Prix d’Amérique, ce qui lui permit d’ajouter un second doublé Cornulier-Amérique à son palmarès. Malheureusement, quelque temps plus tard, l’histoire s’assombrit : le contrôle anti-dopage de Jag ressortit positif, il perdit son titre au prix d’Amérique.
Les rumeurs se répandirent, les amateurs de courses doutaient de ce cheval : pourquoi n’avait-t-il jamais couru à l’étranger ? Ses entraîneurs ont entendu cela et ont décidé de les faire taire en alignant Jag au départ de la célèbre course Elitloppet, en Suède. Il pulvérisa alors le record de la course, avec un temps de 1’09’’4. Malheureusement, un nouveau contrôle anti-dopage positif ruina leurs espoirs.
Personne ne comprenait d’où venaient ces résultats positifs pour un anti-inflammatoire qui peut empêcher de ressentir la douleur et donc augmenter les performances. L’enquête a révélé que la présence de cette substance serait liée à la contamination d’un lot de vitamine C, autorisée, ce qui a mis hors de cause l’entraîneur de Jag. Malgré tout, la substance étant considérée comme dopante, même si elle était présente de façon involontaire, Jag n’a pu récupérer ses titres.
Malgré ces mésaventures, Jag revint pour le Prix de Washington, qu’il gagna avec un temps de 1’09’9, devenant le premier cheval à descendre en dessous de 1’10’’ à l’hippodrome d’Enghien. Malheureusement, il en revint avec une fracture du boulet à l’antérieur droit, qui est rapidement opérée mais qui le contraint à l’arrêt de travail pendant de longs mois. À son retour, début 2007, il termina 5e au Prix de Cornulier et a été disqualifié au Prix d’Amérique pour avoir pris le galop. Le lendemain, un vétérinaire lui diagnostiqua un abcès dentaire qui le faisait beaucoup souffrir et qui expliquait les fautes commises.
Les chevaux ne pouvant courir que jusqu’à 10 ans en France, 2007 maqua la fin de la carrière sportive de Jag de Bellouet. Grâce à ses 36 victoires, il a cumulé plus de 4,22 millions d’euros de gains, le record pour un cheval français et il est le 2e cheval à avoir rapporté le plus d’argent au monde, derrière Varenne et ses 6 millions d’euros de gains.
Celui qu’on a surnommé pendant sa carrière « Le Cannibale » ou « L’Ogre » devint alors reproducteur et donna des poulains de grande qualité, comme Opus Viervil, Paladin Bleu ou Suédois Beau Mec.
Vous avez donc pu découvrir à travers cet article trois Trotteurs Français d’exception : Uranie, Une de Mai et Jag de Bellouet. Chacun a marqué à sa manière son époque. Connaissiez-vous ces trois Trotteurs Français ? Que pensez-vous de leur parcours ? N’hésitez pas à laisser un commentaire !
Ursuline
Sources texte :
– trot.over-blog.com 1 et 2 et 3
– trotteursprovincescourses.skyrock.com
Sources images :
– Image à la une : réalisée par l’illustratrice du Mag’ Rose.
– Vidéo 1
– Vidéo 2
– Vidéo 3
Je ne les connaissais pas du tout, je trouve l’histoire d’Une de Mai particulièrement triste… Au final, elle n’a pas eu de descendance ?
et bien, je n’en connaissait aucun des trois. Merci pour ces information.
Et pour moi, si, elle a eu une pouliche de Quioco. Le problème est qu’elle est morte 1mois après avoir mis bas donc,…faut voir si ses propriétaire ce son bien occupé de sa descendance.
avez vous d’autre photo d’uranie de bonne qualité,
connaissez vous le propriétaire d’uranie avant quelle soit vendu a mr vanakere.
Triste histoire d’une de mai !
Bonjour.
La photo d’Une de Mai présentée ici est-elle publiable ? Sinon, à qui appartiennent les droits ?
Merci