Arman, le montreur d’objets

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Artiste français de renommée internationale, Arman s’est accompli durant sa carrière aussi bien en temps que peintre, sculpteur, mais surtout en temps que plasticien. Récupérations, accumulations, destructions, Arman a su célébrer l’Objet de consommation de manière simple, expressive et variée.
Personnage peu connu en tant que tel, précurseur du courant Nouveau Réalisme, ses œuvres marquent pourtant la sphère publique et privée.
De « L’heure de tous », accumulation d’horloge à la gare Saint-Lazare (Paris) à « La chute des courses », accumulation de caddies, tout le monde connait au moins une de ses œuvres. Cet article vous permettra d’en apprendre un peu plus sur celui qu’on nommait : le montreur d’objets.

Biographie 

 

Arman, à chacune de ses expositions ou inaugurations, quantifiait leur qualité en ce qu’il nommait RP Return (retour sur relation publique). C’est à dire que plus une œuvre faisait parler d’elle, dans la presse, la radio ou autre, plus son succès était important. En un sens, sa vie est également un RP Return sur son talent.
17 novembre 1928 : naissance d’Armand Pierre Fernandez à Nice. Son père, Antonio Francesco Fernandez, d’origine espagnole et originaire d’Algérie, est alors marchand de meubles anciens. Sa mère, Marie Marguerite Jaquet est elle aussi d’origine espagnole.
1933-1940 : anecdote de son enfance, Armand fit toute sa scolarité primaire dans l’école de jeunes filles du Cours Poizat. En effet, très attaché à son amie Micheline à qui il vouait un culte, il vécut leur séparation comme un vrai drame. Les parents de la jeune fille, étant propriétaires des locaux de l’école, firent pression pour que le petit Armand suive sa scolarité dans cet établissement.
1946 : école des arts décoratifs de Nice où il resta deux ans. C’est durant cette période qu’il rencontra Yves Klein et Claude Pascal à un cours de judo. Ils sont devenus ses amis les plus proches.
1949 : École du Louvre à Paris.
1951 : il composa ses premières toiles abstraites, influencé par le peintre russe Serge Poliakoff. Tous deux passionnés de Van Gogh, Armand et Yves Klein avaient décidé de signer leurs œuvres simplement de leur prénom, à l’instar du peintre impressionniste.
1953 : mariage avec Eliane Radigue, musicienne violoniste avec laquelle il eut trois enfants.
1954 : inspiré de Kurt Schwitters et Jackson Pollock (rattaché au dadaïsme pour l’un, à l’expressionnisme abstrait pour l’autre), il s’essaya à la pratique du tampon et il exposa les premiers cachés à Paris en 1956, gagnant sa vie en vendant des meubles et en donnant des cours de plongée.
1958 : Armand devenait définitivement Arman à la suite d’une faute de frappe sur un carton d’invitation à une exposition chez Iris Clert.

1959 : il débutait ses premières accumulations et poubelles
1960 : expansion de sa carrière, où il multiplia les expositions, avec Martial Raysse ou encore sous la houlette de Pierre Restany.
Dans la galerie d’Iris Clert, il avait réalisé en parallèle de l’exposition de Klein : « Saut dans le vide », l’exposition du « plein ».
Le 27 octobre de cette année, au domicile d’Yves Klein, il participa à la création du mouvement Nouveau Réaliste dont le manifeste est écrit par Pierre Restany. Arman le signa avec Dufrêne, Hains, Yves Klein, Martial Raysse, Spoerri, Tinguely et Villeglé.

1961 : premier séjour à New York où il découvrit le milieu artistique New Yorkais et où il rencontra Marcel Duchamp. Tout en exposant régulièrement à la galerie Sonnabend, il commença à toucher à de nouveaux matériaux (polyester, plexiglas …).
1962 : il testa ses premières combustions.
1967 : il commença sa collaboration avec la Régie Renault. Il divorçait d’Elinae Radique
1971 : remariage avec Corice Canton avec laquelle il eut deux enfants. (Il eut un sixième enfant, Yves César né hors-mariage en 1989)
1972 : Arman prenait la nationalité américaine.
1980-1990 : apogée de sa carrière, il multipliait les expositions et les commandes privés ou publiques, dont Long Term Parking, achevé en 1982.
1995 : inauguration de sa plus grosse œuvre : Espoir de paix, à Beyrouth. Accumulation d’une trentaine de chars d’assaut coulés dans du béton. L’œuvre pèse plus de 6000 tonnes et mesure 30m de haut.
1998-2001 : énorme exposition rétrospective de sa carrière à la Galerie du Jeu de Paume en 1998, puis en 2001 au musée d’Art moderne de Nice.
22 octobre 2005 : décès d’Arman à New York

Ci-dessous « Espoir de paix », accumulation de chars d’assaut.


Ci-dessous, trois accumulations d’Arman, commandes publiques.
À gauche, « L’heure de tous », accumulation d’horloges, Gare Saint Lazare – À droite, « Consigne à vie », accumulations de valises soudées.
Au centre, « Le jardin des délices », accumulations d’alambics, Grasse.

 

Courant artistique et évolutions

Arman a travaillé l’objet de diverses façons. Il s’inscrit dans le mouvement Nouveau Réaliste et il en a été un des fondateurs. Selon ses propres paroles (extrait d’un article de Beaux Arts Magazine, paru en 2002) : « Les Nouveaux Réalistes considèrent le monde comme un tableau, [comme la grande] œuvre fondamental[e] dont il s’approprient des fragments dotés d’universelle signifiance. […] C’est la réalité tout entière, le bien commun de l’activité des hommes, la nature au XXe siècle, technologique, industrielle, publicitaire, urbaine, qui est assignée à comparaître. » 
Les nouveaux réalistes prônent donc un retour à la réalité en prenant pour inspiration principale la société de consommation et ils mettent en exergue l’objet. La modernité ordinaire est généralement leur principal sujet d’inspiration.
Ci-dessous, œuvre d’Yves Klein réalisée, lors de la signature du manifeste du courant des nouveaux réalistes

De ce fait, on oppose généralement les Nouveaux Réalistes aux artistes du Pop art. Si le pop est fasciné par la société de consommation et en dépeint une image idéalisée, presque stéréotypée (annonces publicitaires, slogans commerciaux, objets neufs, affiches clinquantes…), les nouveaux réalistes préfèrent une vision plus crue et plus critique. Ils se sont énormément basés sur la récupération (objets de secondes mains ou « déchets », résidus d’affiches publicitaires…), usant pour beaucoup de l’accumulation.
Leur but est généralement de porter un avis critique sur la société moderne au moyen de l’objet, soit en le magnifiant soit, au contraire, en le réduisant à son expression la plus simple.

Pour l’anecdote : Il avait offert « la poubelle de la Factory » à Andy Warhol en échange de son portrait.

Des compressions de César, aux bleus d’Yves Klein, pour les nouveaux réalistes, l’objet et la société de consommation sont au cœur de leur inspiration.
Ci-dessous deux œuvres de nouveaux réalistes; une compression de César et une œuvre dYves Klein.

Arman a connu plusieurs périodes artistiques et, tout en gardant l’objet comme source d’inspiration, il l’a représenté et valorisé de différentes façons :

De 1954 à 1958, Arman s’essaie d’abord aux tampons, déjà en utilisant la répétition et l’accumulation.
Ci-dessous deux tampons d’Arman

Puis il commence ses premières poubelles (poubelles récupérées, objetisées et magnifiées dans des blocs en plexiglas) et des accumulations. Il commence ses premières accumulations avec des petits objets de consommations (ampoules, clés à molette, chapeaux, poupées …)
Ci-dessous de gauche à droite : Poubelle de Jim Dine, « Petits déchets bourgeois » et Poubelle de Bernard Venet.

Les accumulations restent l’élément sur lequel Arman a le plus travaillé. Là encore il a utilisé plusieurs modes opératoires : coulées dans du béton, soudées, dans des vitrines en plexiglas, dans des boîtes, sur panneaux bois ….

Ci-dessous 5 accumulations, dans l’ordre ; une accumulation de clés à molettes soudées« Fer fossiles », accumulations de vieux fers à repasser coulés dans du béton, accumulations de cannettes de Coca-cola dans une vitrine de plexiglas, « A Lourdes », accumulation de béquilles en bois, sur panneau bois, « Ainsi, font, font », accumulations de mains de poupées et poupons dans une boîte.

Arman et le violon : Arman, tout au long de sa carrière, a également beaucoup travaillé avec le violon. Son père, violoniste amateur, lui a inculqué le goût de la musique et en particulier de cet instrument. On retrouvera cet objet dans l’ensemble des styles de ses œuvres. Mais c’est en particulier dans ses projets de « Colères » et de « Découpes » qu’on le retrouvera.
D’ailleurs, surtout à la fin, mais aussi durant toute une partie de sa carrière, il a travaillé successivement sur l’empreinte (empreintes d’objets accumulées), la colère (Destruction violente d’un objet), puis la découpe (désassemblage d’un objet ou découpes arbitraires en lames)
Ci dessous 5 œuvres : empreinte de violons, « Mama Mia » colère sur violon, découpe de violon, colère sur poste de radio et « Caroussel » découpe de moto en bronze

Cependant, ses œuvres les plus célèbres restent les accumulations et en particulier l’œuvre « Long Term Parking »
En 1976, il conçoit un projet d’œuvre d’une tour composée d’empilement de voitures coulées dans du béton. Résidant à cette époque aux États-Unis, il a pour souhait de réaliser l’œuvre là-bas, mais le secrétariat d’état à la culture rejette son dossier. Quelques années plus tard, il fait la rencontre, par le biais de César, de Jean Hammon (futur producteur de l’œuvre) et Alain-Dominique Perrin (président de Cartier et futur créateur de la fondation Cartier, où réside l’œuvre). Après discutions, Jean Hammon lui dit : « Rien n’est impossible » et Arman fait un bout d’essai. Le test se poursuit et donne lieu à la sculpture finale qui mesure 19.50m de haut et qui est constituée de 59 voitures.
Selon les vœux d’Arman, l’œuvre devrait partir en miette au fil des ans, les pneus puis les carcasses s’effritant, ne laissant plus que leur empreinte dans le béton, pour que celui-ci disparaisse enfin.
Ci-dessous photot de « Long Term Parking »

Pour conclure cet article, quelques autres œuvres connues d’Arman.
Ci-dessous : « La chute des courses » accumulation de caddies et « Ionesco » accumulation de chaises en hommage à l’auteur, à Lille.

Ci dessous : deux cascades, accumulations respectivement de pinceaux et tubes de peinture.

Enfin ci-dessous, trois accumulations : « Avalanche » accumulations de haches en bronze, « Les Gourmandes » accumulation de fourchettes géantes à Roanne, France et « Plante Grasse » accumulation de tambours de machines à laver.

Voilà, j’espère que cet article vous a plu et qu’il vous a donné envie de découvrir un peu plus l’univers d’Arman, car il s’agit d’un artiste que j’affectionne particulièrement.
Si vous vous rendez à Paris, vous pourrez facilement trouver trois de ses œuvres dans l’espace public, à savoir : l’accumulation d’horloges « l’heure de tous » cour du Havre devant une entrée de la gare Saint-Lazare, l’accumulation de valises  » Consignes à vie » cour de Rome également devant une entrée de la gare Saint-Lazare et enfin une découpe et assemblage en bronze de la Vénus de Milo et d’instruments de musique géants, « La Vénus des arts » qui se trouve place Jacques Callot.
Par ailleurs, si vous décidez de faire la tournée des musées à Paris, si l’exposition de Diane Arbus avait lieu au musée du Jeu de Paume, les œuvres de Picasso se trouvant dans son propre musée, vous trouverez des œuvres d’Arman au MaM (Musée d’art Moderne), 11 avenue du Président Wilson 75116 Paris.

Sources texte :
Wikipedia
Cours personnels d’arts plastiques
Histoire de l’art du Moyen Âge à nos jours – édition Larousse
www.arman.com (site officiel)
 Sources images:
www.arman.com (site officiel)
lfdi.bring-communication.net
arman-studio.com
art-value.com

Traino’

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