Le mors est un élément central du harnachement utilisé le plus souvent en équitation classique. Nous vous avions d’ailleurs présenté sur le Mag’ les différents types de mors. Cependant, les chevaux n’ont pas toujours été montés avec cette pièce dans la bouche, et la tendance actuelle est plutôt de s’en passer. Retrouvez dans la suite de cet article un historique de l’utilisation du mors ainsi que les raisons qui poussent certains cavaliers à passer au sans mors aujourd’hui.
Histoire de l’équitation : sans mors, avec et à nouveau sans mors
Il est assez compliqué de retracer l’historique de l’utilisation du mors en équitation. Il est important de se rappeler que le cheval a été domestiqué il y a environ 50 000 ans pour sa viande et son lait, mais que son utilisation comme animal de travail (agriculture, transport…) ne remonte qu’à environ 5 000 ans. Il pouvait alors s’agir de travail en main, mais aussi attelé ou monté.
De par sa domestication bien plus tardive que d’autres animaux, il n’est pas rare de voir des harnachements d’autres bêtes adaptés au cheval. En voici quelques exemples :
- un anneau placé dans sa cloison nasale à la manière de ce qui se fait encore aujourd’hui pour les bœufs ;
- une simple lanière placée autour de son encolure comme cela se faisait pour les ânes ;
- différents types de harnachements ressemblant à des licols et dérivés du matériel utilisé pour les dromadaires et les chameaux…
Les recherches historiques tendent toutes à démontrer que c’est d’abord l’équitation sans mors qui s’est développée, et que ce dernier n’est apparu que plus tard. Malgré tout, les harnachements étant fabriqués en corde, en cuir voire en tendon, peu de traces ont pu être retrouvées pour dater et étudier précisément les pratiques équestres.
Dans un premier temps, les cavaliers auraient utilisé une simple cordelette autour du cou de leur monture avant de faire évoluer ce harnachement en sorte de licol auquel étaient fixées des rênes. Ces éléments étaient suffisants pour assurer la direction du cheval, qui n’avait pas besoin d’être très précise : les mouvements étaient plutôt amples et les changements de direction assez larges.
Les premiers mors seraient apparus il y a 5 000 à 6 000 ans au Kazakhstan, parmi les Botaï. Il s’agissait de mors assez doux, qui servaient d’abord simplement à guider plus précisément le cheval pour le travail puis pour la guerre. Ils se sont développés dans les peuples égyptiens et phéniciens principalement.
Cependant, le mors ne s’est ensuite répandu que très progressivement. En Europe, les premières traces de mors ont été retrouvées à Athènes il y a environ 2500 à 3000 ans, et cet instrument proviendrait des Phéniciens, lorsque ce peuple a importé le bronze en Europe.
Le mors était alors fait d’une seule pièce droite en bronze, un matériau que les Phéniciens savaient parfaitement travailler. Après quelques siècles, le mors a évolué, tant dans sa matière (le bronze a progressivement remplacé le fer, car il était plus accessible et facile à travailler) que dans sa forme (ajout de perforations dans les montants, d’une articulation dans le mors, d’éléments stimulant la salivation du cheval…).
On estime cependant qu’en Espagne, son utilisation est bien plus tardive puisqu’elle remonterait à la conquête de la péninsule par les Maures, au VIIIe siècle. Par la suite, les conquistadors ont exporté cette pratique en Amérique lorsqu’ils s’y sont installés.
L’évolution des pratiques équestres a entraîné une modification des mors. Des mors d’une grande diversité se sont développés pour s’adapter au mieux au cheval et aux besoins des cavaliers, en particulier au cours du Moyen Âge et de la révolution industrielle (XVIIIe siècle). Le mors devient peu à peu une aide en équitation, car il permet une grande finesse dans les mouvements exécutés, ce qui est particulièrement important en dressage par exemple.
Ces dernières années, l’utilisation du mors est parfois remise en question. La tendance est à la simplification de celui-ci et à la diminution de sa sévérité et des contraintes qu’il exerce.
Son retrait a longtemps été considéré comme un achèvement lorsque l’éducation du cheval et son harmonie avec son cavalier sont atteintes. Cependant, il est aujourd’hui considéré que monter sans mors est simplement une nouvelle façon de communiquer avec son équidé, qui s’éloigne de celle qui est plus couramment enseignée et utilisée.
Les raisons de monter sans mors
Les défenseurs de l’équitation sans mors avancent plusieurs arguments pour cette pratique.
Le premier est purement anatomique. Un cheval ne peut pas respirer et déglutir en même temps. Lorsqu’il a quelque chose dans la bouche (un mors par exemple), l’équidé va naturellement saliver pour l’avaler et avoir besoin de déglutir plus régulièrement. Cela le contraint dans sa respiration, qu’il doit arrêter au moment d’avaler sa salive, et peut donc réduire sa concentration, provoquer un certain stress, limiter ses efforts physiques et même être à l’origine de certains problèmes (accélération du rythme cardiaque, colique…). Ainsi, l’utilisation d’un mors peut réduire les performances physiques des chevaux à cause des contraintes qu’il impose sur sa respiration.
Photographie d’Usmar, un Paint Horse, à l’obstacle en Likorne classique – illustration provenant d’Aquitaine Cheval Performance
Le second argument concerne plus la pratique équestre en elle-même. Naturellement, sans cavalier, un cheval est capable d’exécuter des figures de dressage, y compris les plus complexes, de même que tous les mouvements qui lui sont demandés lors du travail en saut d’obstacles, en western… L’objectif du travail équestre est de pouvoir retrouver ces mouvement naturels sous la selle, à la demande et avec une propulsion et un équilibre contrôlés. Pour cela, plusieurs aides peuvent être utilisées, et le mors en fait partie. Les adeptes de l’équitation sans mors mettent en garde contre l’utilisation du mors qui peut être un cache-misère de certains problèmes de communication entre le cavalier et sa monture, le mors devenant un outil de contrôle et de soumission du cheval.
De nombreux harnachements se sont développés sans mors. Cependant, le fait que le cheval n’ait rien dans la bouche ne signifie pas obligatoirement qu’il subit moins de contraintes que s’il en avait. En effet, certains équipements pour monter sans mors peuvent être très sévères et exercer des pressions qui peuvent être douloureuses s’ils sont mal réglés ou mal utilisés. C’est par exemple le cas du hackamore mécanique, mais nous reviendrons sur les différents équipements pour monter sans mors dans un prochain article.
Ainsi, le mors n’a pas toujours fait partie de l’harnachement des chevaux, et son utilisation est même plutôt récente quand on la compare au début de la domestication du cheval. Bien qu’il soit aujourd’hui presque incontournable dans l’équitation classique, le mors est de plus en plus remis en question, et de nombreux cavaliers s’orientent vers une monte sans cet outil.
Êtes-vous surpris par l’historique de l’utilisation du mors en équitation ? Que pensez-vous des arguments contre son utilisation ? Avez-vous déjà essayé de monter sans mors ? Dites-nous tout dans un commentaire !
Ursuline
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